Interviews de rentrée (4/7) | Simon Davies, l’homme dans l’ombre de Kompany : "Le foot, c’est aussi de la géométrie"
Dans l’ombre de Vincent Kompany, le T1 Simon Davies parle de projet de jeu, d’ambitions et même de Sir Alex Ferguson.
- Publié le 24-07-2019 à 07h01
- Mis à jour le 26-07-2019 à 21h54
Dans l’ombre de Vincent Kompany, le T1 Simon Davies parle de projet de jeu, d’ambitions et même de Sir Alex Ferguson. Jamais un nouvel entraîneur n’avait aussi peu fait parler de lui dans l’histoire du RSC Anderlecht. Simon Davies est officiellement T1 parce que Vincent Kompany joue encore et parce qu’il n’a pas le diplôme requis. Un rôle plus discret dont le Gallois s’accommode très bien. Quand il jouait chez les jeunes de Manchester United, il était déjà dans l’ombre des Beckham, Scholes et Giggs, les autres talents de la fameuse Class of 92 des Red Devils.
"Avec des gars comme ça, tu étais tiré vers le haut. Quand on est arrivé en équipe A sous les ordres d’Alex Ferguson, c’était les meilleurs entraînements avec les meilleurs joueurs."
Peut-on comparer Kompany et Ferguson ?
"J’ai eu la chance de jouer neuf ans à Manchester United. Celui qui travaillait le plus dur de tous au club, c’était Ferguson. C’était un autre temps et un autre style de jeu mais j’étais impressionné par sa force de travail. C’est la même chose avec Vinnie. Il travaille très dur. On a beaucoup de personnes qui bossent beaucoup dans le staff mais personne autant que Vinnie."
Kompany, vous et d’autres membres du staff habitez toujours dans un hôtel près du club. Vous n’avez pas l’impression de bosser 24 h sur 24 ?
"On parle beaucoup de football ensemble. Flo (Ngalula Mbuyi) et Craig (Bellamy) sont aussi avec nous. On parle quand même d’autre chose parfois. Il y a aussi Kevin, notre analyste vidéo. Lui aussi travaille comme un dingue à compiler toutes les images. Mais on ne voit pas ça comme un job. On fait quelque chose d’agréable. On ne compte pas nos heures."
Vous êtes le T1 et Kompany est à la fois votre supérieur et votre joueur. Comment ça se passe ?
"Très bien. L’équilibre est facile à trouver car on a une bonne relation de travail. Vinnie est un super joueur et manager mais c’est avant tout un super mec. Il est bien avec les joueurs mais aussi avec le staff. C’est une nouvelle façon de fonctionner et on fera des erreurs. Mais on cherche toujours ce qui est le mieux pour Anderlecht."
Quand il ne jouait pas pendant la préparation, Kompany coachait avec beaucoup de passion et de grands gestes depuis le banc. En championnat, il devra s’asseoir en tribune s’il n’est pas sur la feuille de match. Arrivera-t-il à rester calme ?
"En tribune, tu vois parfois les choses différemment. Le terrain ressemble au tableau où tu places les pions à la théorie. Je connais des managers en Premier League qui montent en tribune en première mi-temps pour avoir un meilleur aperçu du jeu. Mais Vinnie sera avant tout sur le terrain."
Est-il possible de se concentrer sur son propre jeu et sur celui de ses équipiers ?
"Il coachera depuis le terrain mais il verra quelle est la meilleure manière de le faire. Avoir un coach sur le terrain, ça peut être un formidable avantage."
Est-il compliqué d’expliquer la philosophie de jeu de Guardiola aux joueurs ?
"La philosophie est la même, possession et pressing, mais le système n’est pas à 100 % celui de Manchester City. On ne s’adaptera pas toujours de la même manière aux qualités et aux défauts d’un adversaire. Il y a beaucoup de choses à apprendre dans ce système mais on avance bien. Vous savez, j’ai aussi un jour dû l’apprendre et ça a pris du temps."
Mais le championnat commence dimanche. Les joueurs maîtrisent-ils suffisamment le système pour avoir directement des résultats ?
"C’est la compétition qui va rendre l’équipe compétitive. Il y a beaucoup de concurrence, c’est ce qu’on voulait. Pendant la préparation, on a tenté des choses car le contexte le permettait."
Le jeu du gardien sera-t-il aussi risqué en championnat qu’en préparation ?
"L’objectif n’est pas de prendre des risques mais d’être en bonne position. Parfois, ça peut donner l’impression d’être risqué si les autres joueurs n’occupent pas bien l’espace autour du gardien mais on fait ça car on veut jouer au football. Si on dit au gardien de faire des longues relances et que l’adversaire est plus fort que nous physiquement, on va perdre tous les ballons. Et c’est mieux d’avoir le ballon, non ? Si Manchester City balance des longues balles devant, Sterling et Agüero ne vont pas en garder beaucoup. Au sol, c’est plus simple pour eux."
Il faut un gardien très doué aux pieds pour ça, comme Ederson à City. Les gardiens d’Anderlecht peuvent-ils y parvenir ?
"Tous nos gardiens le font bien depuis la préparation. Il y aura des erreurs mais ça se passe bien très souvent. Le gardien doit avoir un maximum de possibilités de relance. C’est le boulot des défenseurs et des médians d’être au bon endroit pour aider le gardien. On demande ça à l’équipe car on croit que c’est la bonne façon de faire."
Il manque encore un avant-centre qui convient à votre système.
"Le meilleur neuf, c’est celui qui marque beaucoup (rires). Le style de neuf qu’on veut, c’est quelqu’un qui presse bien, qui a des facilités avec le ballon et qui sait jouer avec les autres. C’est la même chose pour le poste de numéro 10 et tous les autres. Mais on demande au neuf de marquer des buts."
À Hambourg samedi, Gerkens l’a plutôt bien fait, non ?
"Oui, il a fait ça de manière fantastique et il a marqué un but. Pieter écoute tout ce qu’on lui dit et il sait jouer à différentes positions."
Votre système ressemble parfois à de la géométrie.
"C’est un peu ça aussi, c’est vrai. Le joueur doit être au bon endroit au bon moment. Pour jouer de notre façon, il faut faire les bonnes courses à la bonne distance. La manière dont on veut construire le jeu est très compliquée. Il faut faire de gros efforts mais les joueurs écoutent bien. On fera des erreurs et c’est normal. C’est encore tout nouveau alors qu’une équipe comme l’Ajax utilise la même philosophie depuis des dizaines d’années. Ils ne doivent pas le faire avec des nouveaux joueurs en six semaines."
Pour rentabiliser le temps au mieux, vous faites même des briefings avant chaque entraînement.
"Oui. On explique clairement aux joueurs ce qu’on va faire pendant la séance. Qu’on ne fait pas des choses juste pour dire. Derrière chaque exercice, il y a une raison. Même pendant un exercice classique de possession de balle, on demande aux joueurs de tenir des positions bien précises. De suivre des lignes, avec ou sans le ballon. Le staff essaie de décrire et d’expliquer au maximum dans le détail. Après la séance, on regarde les images et on voit si on a atteint notre objectif ou non."
Outre Kompany, Nasri et Sandler connaissent aussi le système de Guardiola. Est-ce important ?
"On essaie avant tout de recruter des joueurs qui se fondent parfaitement dans cette philosophie. Des joueurs qui s’adaptent et réfléchissent."
Le transfert de Nasri est quand même un sacré coup. Avez-vous été vous-même surpris qu’il vienne à Anderlecht ?
"Je savais que c’était possible mais tu ne sais jamais avec les grands joueurs comme Samir. On est très heureux qu’il soit ici. Il peut vraiment nous aider. On veut remettre Anderlecht au sommet et il faut oser rêver en grand."
Avec quelle place finale serez-vous satisfait ?
"Ça n’a pas de sens de viser la deuxième ou la troisième place. La plus haute place possible, c’est la première. On l’espère dès la première année. Si on n’y arrive pas, alors la deuxième année. We are Anderlecht. On doit toujours viser le maximum. C’est l’état d’esprit du président, de Vinnie et de tout le monde dans le club."
Qui sera le capitaine cette saison ?
"Ce ne sera pas Vinnie en tout cas. Il a déjà pas mal de choses à faire (rires). On n’en a pas encore discuté. Il est tellement occupé. Ce qui est important, c’est d’avoir des leaders sur le terrain. À Manchester, s’il n’avait pas eu le brassard, il aurait quand même été le leader. Que Vinnie soit capitaine ou pas, il sera un leader sur le terrain."
L’an dernier, Trebel était capitaine. Aujourd’hui, il doit absolument quitter le club. Est-ce une situation difficile à gérer ?
"C’est plus Vinnie qui s’occupe de cet aspect-là. Il y a toujours des joueurs déçus dans un club. Le plus important, c’est d’être honnête. On explique pourquoi aux joueurs. Ils ne seront peut-être pas heureux ensuite mais, au moins, ils sauront pourquoi. On ne peut aligner que onze joueurs. Et certains vont donc être hors du noyau. On fait ce qui est le mieux pour le club."
Vous devez encore fameusement dégraisser le noyau.
"Oui et ce n’est pas facile car tout le monde travaille de manière fantastique. Certains sont plus forts que d’autres évidemment mais personne n’a montré une attitude négative."
C’est parfois ce qui était reproché aux jeunes talents de l’équipe l’an passé. Kompany a-t-il dû serrer la vis ?
"Vinnie parle avec tous les joueurs de la même manière. Que ce soit à la star de l’équipe ou à un U12. Il faisait la même chose à Manchester. Quand tu joues deux ou trois matchs, tu as encore un long chemin avant d’être un joueur reconnu de l’équipe A."
Dans nos colonnes, le papa de Verschaeren disait s’attendre à une saison plus compliquée que la première pour son fils.
"La première saison, on ne fait pas toujours attention à un jeune. Puis on remarque qu’il est bon et on est plus attentif à ses prestations la seconde saison. C’est aussi valable pour l’adversaire qui le surveille plus. Il faut travailler plus dur pour trouver de l’espace. C’est ce que les joueurs du top font : ils continuent à produire des grandes prestations, saison après saison."